19
septembre
2024
Cour de cassation
Pourvoi n° 22-22.984
Deuxième chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA
Publié au Bulletin
ECLI:FR:CCASS:2024:C200787
Titres et sommaires
AVOCAT
Texte de la décision
Entête
CIV. 2
FD
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 19 septembre 2024
Rejet
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 787 F-B
Pourvoi n° N 22-22.984
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 19 SEPTEMBRE 2024
M. [I] [Y], domicilié [Adresse 2], [Localité 3], a formé le pourvoi n° N 22-22.984 contre l'arrêt rendu le 6 septembre 2022 par la cour d'appel de Pau (1re chambre), dans le litige l'opposant à M.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Pradel, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [Y], de la SCP Poupet & Kacenelenbogen, avocat de M. [W], et l'avis de M. Grignon Dumoulin, avocat général, après débats en l'audience publique du 25 juin 2024 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Pradel, conseiller référendaire rapporteur, Mme Leroy-Gissinger, conseiller doyen, et Mme Cathala, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Exposé du litige
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Pau, 6 septembre 2022), M. [W] a confié, à distance, à M. [Y] (l'avocat), la défense de ses intérêts à l'occasion d'une procédure pénale. Un contrat de mission et de rémunération au forfait a été signé entre les parties le 11 mars 2019.
2. Par lettre du 21 mars 2019, M. [W] a informé son avocat qu'il souhaitait exercer son droit de rétractation et a sollicité le remboursement de l'acompte qu'il avait versé.
3. Le 14 juin 2021, M. [W] a saisi un tribunal judiciaire d'une demande tendant au prononcé de la nullité du contrat de mission et de rémunération et à la condamnation de l'avocat à lui restituer l'acompte versé.
4. L'avocat a, in limine litis, soulevé l'incompétence du tribunal judiciaire.
Moyens
Examen du moyen
Enoncé du moyen
5. L'avocat fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté l'exception d'incompétence qu'il avait soulevée et l'a invité à conclure sur le fond et, y ajoutant, de le condamner à payer à M. [W] une certaine somme sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, alors :
« 1°/ que le bâtonnier et le premier président sont compétents pour statuer sur les exceptions relatives à la validité d'une convention d'honoraires ; qu'en décidant, pour dire que la juridiction de droit commun était compétente, que le litige qui lui était soumis ne concernait ni le montant ni le recouvrement des honoraires mais portait sur la question de la validité de la convention d'honoraires, la cour d'appel a méconnu ses pouvoirs et violé les articles 174 et suivants du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 ;
2°/ que toute contestation concernant le montant et le recouvrement des honoraires, frais et débours de l'avocat ne peut être réglée, à défaut d'accord entre les parties, qu'en recourant à la procédure prévue aux articles 174 et suivants du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat ; que cette procédure spéciale, qui oblige à soumettre ces contestations successivement au bâtonnier de l'ordre des avocats auquel appartient l'avocat concerné puis au premier président de la cour d'appel, exclut, par sa nature, la compétence du tribunal judiciaire ; qu'en décidant, pour dire que la juridiction de droit commun était compétente, que le litige qui lui était soumis ne concernait ni le montant ni le recouvrement des honoraires mais portait sur la question de la validité de la convention d'honoraires, cependant qu'il ressortait de l'article 9 de la convention d'honoraires du 11 mars 2019 qu'elle indiquait expressément que « toute contestation concernant le montant et le recouvrement des honoraires, frais et débours de l'avocat ne peut être réglée, à défaut d'accord entre les parties, qu'en recourant à la procédure prévue aux articles 174 et suivants du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat » la cour d'appel a violé l'article 1103 du code civil ;
3°/ qu'en toute hypothèse l'article L. 221-28 du code de la consommation commande que le droit de rétractation ne peut être exercé pour les contrats ayant pour objet certains produits ou certaines prestations spécifiques ; que le consommateur perd ainsi son droit de rétractation dans le cas de la fourniture de certaines prestations de services qui sont notamment visés à l'article L. 221-28, 3° du code de la consommation et qui concernent les contrats de fourniture de biens confectionnés selon les spécifications du consommateur ou nettement personnalisés ; qu'en estimant par motifs adoptés des premiers juges, que le litige qui lui était soumis ne portait pas sur le montant ou sur le recouvrement des honoraires mais sur l'existence même de la convention d'honoraires conclue entre les parties dans la mesure où sa validité était contestée au regard des règles du code de la consommation, qui prévoyaient qu'un contrat signé hors établissement et à distance devait être pourvu d'un formulaire détachable de rétractation cependant que le contrat litigieux concernait la fourniture d'un service nettement personnalisé, ce qui excluait tout droit de rétractation, la cour d'appel a violé l'article L. 221-28 du code de la consommation. »
Motivation
Réponse de la Cour
6. Selon l'article 174 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat, les contestations concernant le montant et le recouvrement des honoraires des avocats ne peuvent être réglées qu'en recourant à la procédure prévue aux articles 175 à 179 de ce texte.
7. Il résulte de ce texte, qui est d'interprétation stricte, que le premier président n'est compétent pour statuer sur la validité d'un contrat de mission comportant convention d'honoraires que lorsque la demande en nullité est invoquée, en défense, pour s'opposer à une demande de l'avocat en recouvrement de ses honoraires.
8. Ayant relevé que M. [W] avait saisi un tribunal judiciaire, par voie d'action, en qualité de consommateur, afin de faire constater la mise en uvre de son droit de rétractation, c'est à bon droit que la cour d'appel a rejeté l'exception d'incompétence invoquée par l'avocat.
9. Le moyen, qui est inopérant en sa troisième branche, en ce qu'elle invoque la violation d'une règle du droit de la consommation alors que l'arrêt n'a pas statué sur le fond, n'est, dès lors, pas fondé pour le surplus.
Dispositif
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [Y] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [Y] et le condamne à payer à M. [W] la somme de 1 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf septembre deux mille vingt-quatre.
septembre
2024
Cour de cassation
Pourvoi n° 22-22.984
Deuxième chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA
Publié au Bulletin
ECLI:FR:CCASS:2024:C200787
Titres et sommaires
AVOCAT
Texte de la décision
Entête
CIV. 2
FD
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 19 septembre 2024
Rejet
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 787 F-B
Pourvoi n° N 22-22.984
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 19 SEPTEMBRE 2024
M. [I] [Y], domicilié [Adresse 2], [Localité 3], a formé le pourvoi n° N 22-22.984 contre l'arrêt rendu le 6 septembre 2022 par la cour d'appel de Pau (1re chambre), dans le litige l'opposant à M.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Pradel, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [Y], de la SCP Poupet & Kacenelenbogen, avocat de M. [W], et l'avis de M. Grignon Dumoulin, avocat général, après débats en l'audience publique du 25 juin 2024 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Pradel, conseiller référendaire rapporteur, Mme Leroy-Gissinger, conseiller doyen, et Mme Cathala, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Exposé du litige
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Pau, 6 septembre 2022), M. [W] a confié, à distance, à M. [Y] (l'avocat), la défense de ses intérêts à l'occasion d'une procédure pénale. Un contrat de mission et de rémunération au forfait a été signé entre les parties le 11 mars 2019.
2. Par lettre du 21 mars 2019, M. [W] a informé son avocat qu'il souhaitait exercer son droit de rétractation et a sollicité le remboursement de l'acompte qu'il avait versé.
3. Le 14 juin 2021, M. [W] a saisi un tribunal judiciaire d'une demande tendant au prononcé de la nullité du contrat de mission et de rémunération et à la condamnation de l'avocat à lui restituer l'acompte versé.
4. L'avocat a, in limine litis, soulevé l'incompétence du tribunal judiciaire.
Moyens
Examen du moyen
Enoncé du moyen
5. L'avocat fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté l'exception d'incompétence qu'il avait soulevée et l'a invité à conclure sur le fond et, y ajoutant, de le condamner à payer à M. [W] une certaine somme sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, alors :
« 1°/ que le bâtonnier et le premier président sont compétents pour statuer sur les exceptions relatives à la validité d'une convention d'honoraires ; qu'en décidant, pour dire que la juridiction de droit commun était compétente, que le litige qui lui était soumis ne concernait ni le montant ni le recouvrement des honoraires mais portait sur la question de la validité de la convention d'honoraires, la cour d'appel a méconnu ses pouvoirs et violé les articles 174 et suivants du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 ;
2°/ que toute contestation concernant le montant et le recouvrement des honoraires, frais et débours de l'avocat ne peut être réglée, à défaut d'accord entre les parties, qu'en recourant à la procédure prévue aux articles 174 et suivants du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat ; que cette procédure spéciale, qui oblige à soumettre ces contestations successivement au bâtonnier de l'ordre des avocats auquel appartient l'avocat concerné puis au premier président de la cour d'appel, exclut, par sa nature, la compétence du tribunal judiciaire ; qu'en décidant, pour dire que la juridiction de droit commun était compétente, que le litige qui lui était soumis ne concernait ni le montant ni le recouvrement des honoraires mais portait sur la question de la validité de la convention d'honoraires, cependant qu'il ressortait de l'article 9 de la convention d'honoraires du 11 mars 2019 qu'elle indiquait expressément que « toute contestation concernant le montant et le recouvrement des honoraires, frais et débours de l'avocat ne peut être réglée, à défaut d'accord entre les parties, qu'en recourant à la procédure prévue aux articles 174 et suivants du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat » la cour d'appel a violé l'article 1103 du code civil ;
3°/ qu'en toute hypothèse l'article L. 221-28 du code de la consommation commande que le droit de rétractation ne peut être exercé pour les contrats ayant pour objet certains produits ou certaines prestations spécifiques ; que le consommateur perd ainsi son droit de rétractation dans le cas de la fourniture de certaines prestations de services qui sont notamment visés à l'article L. 221-28, 3° du code de la consommation et qui concernent les contrats de fourniture de biens confectionnés selon les spécifications du consommateur ou nettement personnalisés ; qu'en estimant par motifs adoptés des premiers juges, que le litige qui lui était soumis ne portait pas sur le montant ou sur le recouvrement des honoraires mais sur l'existence même de la convention d'honoraires conclue entre les parties dans la mesure où sa validité était contestée au regard des règles du code de la consommation, qui prévoyaient qu'un contrat signé hors établissement et à distance devait être pourvu d'un formulaire détachable de rétractation cependant que le contrat litigieux concernait la fourniture d'un service nettement personnalisé, ce qui excluait tout droit de rétractation, la cour d'appel a violé l'article L. 221-28 du code de la consommation. »
Motivation
Réponse de la Cour
6. Selon l'article 174 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat, les contestations concernant le montant et le recouvrement des honoraires des avocats ne peuvent être réglées qu'en recourant à la procédure prévue aux articles 175 à 179 de ce texte.
7. Il résulte de ce texte, qui est d'interprétation stricte, que le premier président n'est compétent pour statuer sur la validité d'un contrat de mission comportant convention d'honoraires que lorsque la demande en nullité est invoquée, en défense, pour s'opposer à une demande de l'avocat en recouvrement de ses honoraires.
8. Ayant relevé que M. [W] avait saisi un tribunal judiciaire, par voie d'action, en qualité de consommateur, afin de faire constater la mise en uvre de son droit de rétractation, c'est à bon droit que la cour d'appel a rejeté l'exception d'incompétence invoquée par l'avocat.
9. Le moyen, qui est inopérant en sa troisième branche, en ce qu'elle invoque la violation d'une règle du droit de la consommation alors que l'arrêt n'a pas statué sur le fond, n'est, dès lors, pas fondé pour le surplus.
Dispositif
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [Y] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [Y] et le condamne à payer à M. [W] la somme de 1 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf septembre deux mille vingt-quatre.