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Le harcèlement ! Quelle toxicité insidieuse !

     

Jilali Chabih,

Docteur et HDR, Paris 2 et Paris 5, et Docteur d’État, UCAM- Maroc, en droit, finance, fiscalité, administration et méthodes de recherche



Le harcèlement ! Quelle toxicité insidieuse !
1)-Ce mal sournois qui dévore le tissu social !

Victimes, agresseurs et destruction du milieu : familial, scolaire, professionnel et sociétal…Ce mal perfide qui ronge de l’intérieur tous ceux qui sont vulnérables, sous domination, menace, intimidation, ou ceux qui sont simplement timides, corrects, tranquilles, gentils ou sages comme une image. C’est un mal insidieux qui corrode l’intérieur de la personne et qui fait malheureusement beaucoup de victimes. Lui, l’auteur ou le malfaiteur s’en sort indemne, souvent, très souvent, quoique, trainant ses problèmes. Alors que la victime, elle, souffre en silence, voire jusqu’à commettre un acte regrettable : de nombreux élèves sont victimes de harcèlement dont les conséquences sont lourdes à supporter : repli, tristesse, dépression, idées suicidaires, tentatives de suicide, voire suicide malheureusement[1].   

Un simple mot vexatoire répété, un commentaire obscène réitéré, une réflexion haineuse, persistante, peut anéantir l’orgueil, la volonté, ou le rêve d’un individu, d’une ou d’un malheureux qui n’avait fait de mal à personne, sa seule faute, sa seule erreur, peut-être, c’était d’être là où il (ou elle) ne devait pas être ! Ces agissements abjects, répréhensibles sont souvent commis, très souvent même, par des enfants, des adolescents, des jeunes et des moins jeunes, sans même réfléchir. Et ne me dites jamais : je vois «l’innocence enfantine dans ses yeux[2]».       

2)- Qu’est-ce le harcèlement ?

 Ce phénomène social porte un nom, qui désigne une conduite abusive, blâmable, condamnable : le harcèlement ! Qu’est-ce que le harcèlement ? En effet, tous les jours, nombreuses sont les victimes qui se cachent derrière une apparence de « tout va bien », une mine souriante, ou presque, mais la souffrance sous les faits de violence physique, psychologique ou verbale répétées les ronge gravement, intérieurement et en silence. Ignorer ce mal, le sous-estimer c’est se résigner et accepter qu’il prenne racine. Alors qu’il faut justement, vu sa dangerosité personnelle, familiale, institutionnelle ou sociale, l’attaquer à la racine, l’extirper à jamais, telle une mauvaise herbe ! Même Barack Obama, était harcelé et moqué durant son enfance. Il déclare en 2011: « Avec mes grandes oreilles et le prénom que je porte, je n’ai pas été épargné par le harcèlement scolaire et je n’en suis pas tout à fait sorti indemne[3]».    
Le harcèlement est une forme de stigmatisation, de rejet ou de discrimination, en raison de l’apparence physique ou vestimentaire, de la religion, mais aussi par jalousie, ou par haine et «désir de nuire », qui peuvent conduire à des comportements répétitifs traumatisants, dangereux voire dévastateurs. Le cas de la jeune adolescente victime de harcèlement sur les réseaux sociaux qui s’est suicidée en mai 2021 : « On l’a poussée à mettre fin à ses jours !», témoignage de la mère[4].   
Il peut se traduire aussi par d’autres formes qui sont loin d’être anodines à l’exemple de moqueries ou de remarques désobligeantes, d’actes physiques blessants, de gestes persistants déplaisants, par une réaction agressive renouvelée, des propos, SMS, mail ou appels téléphoniques martelés, ou une conduite, une attitude, une manière de se comporter à l’égard d’autrui irritante, agaçante, humiliante voire violente. « J’ai vécu, a confié en 2023, l’ex-Premier ministre français Gabriel Attal, un déferlement d’insultes et d’injures en raison de mon orientation sexuelle quand j’étais au collège et ça a duré plusieurs mois et ça a été très violent[5]».  
Le harcèlement peut aussi être un incident isolé, comme le cas du harcèlement sexuel de rue[6], ou un message numérique malveillant à l’égard de la victime, ou un comportement psychologique ou social répétitif mais grave et dégradant, comme la domination, l’intimidation ou l’agressivité. Il se présente également sous la forme de propos injurieux, de rumeurs ou de fausses accusations, d’images d’autrui, sur les réseaux sociaux, dégradantes, ou l’usurpation de compte ou d’identité digitale, c’est ce que l’on appelle le cyberharcèlement. Derrière chaque agresseur, mais surtout derrière chaque victime il y a assurément un parcours perturbé, un itinéraire triste, malheureux, une histoire douloureuse, voire tragique qui vaut la peine d’être entendue, qui mérite d’être écoutée, et qui, le cas échéant, et selon sa gravité, peut aller jusqu’à traduire son auteur en justice pour répondre de ses actes répréhensibles. Au Canada, le harcèlement caractérisé, est un crime « passible d’une peine maximale » qui peut aller jusqu’à 10 ans de réclusion[7].
Il y a harcèlement aussi lorsqu’on vous attribue un sobriquet, on vous interpelle de façon injurieuse ou obscène, lorsqu’on vous menace, on vous intimide, on vous frappe, on vous pousse, de façon persistante. Lorsqu’on établit avec vous des contacts physiques inutiles, ou des « comportements sexualisés inappropriés », voire grave comme frapper en infligeant une blessure (d’après le témoignage d’une collégienne), ce qui peut être aussi considéré comme une agression susceptible d’un recours au tribunal pour sanction d’acte préjudiciable et faire ainsi valoir ses droits. « Si on en arrive à une situation de judiciarisation, c’est parce que tout ce qui s’est passé avant a échoué [8]».                             

3)- Quelles sont les manifestations du harcèlement ? Quels sont les agissements, actes, conduites et pratiques du harcèlement ?

Le phénomène du harcèlement peut se manifester de différentes manières : physiquement, verbalement, psychologiquement ou socialement. Physiquement le harcèlement se manifeste sous forme d’agression, de contacts désobligeants, de bousculades humiliantes, de croche-pieds dans les cours de récréation, de chamailleries provocantes, et cela à chaque occasion où l’on rencontre le bouc-émissaire, où l’on croise la victime (propos recueillis en substance de collégiennes).   
-Verbalement, le harcèlement se traduit par des insultes, des disputes, des altercations, de la colère, de l’intimidation ou la déstabilisation, des menaces envers la personne visée, voire des menaces de mort envers la victime[9]. Il se traduit également par des critiques, des moqueries, des taquineries, des railleries, des attitudes de dégoût, des gestes obscènes, des grimaces à l’égard de la personne victime du harcèlement. Des statistiques en droit comparé indiquent qu’en 2023 les victimes de cyberharcèlement étaient plus de 60% chez les jeunes et de 40% chez les adultes[10].
-Psychologiquement, le harcèlement peut affecter le for intérieur de la victime, dans tout ce qui est mental, moral, affectif, émotionnel, sentimental, à l’exemple de dénigrement, de disqualification, de rabaissement, d’abus narcissique, d’humiliation, de discrimination, de maltraitance, de subordination, de relation toxique ou de manipulation. Ces différents comportements répréhensibles portent atteinte à la dignité de la personne, font outrage à l’estime de soi, à l’intégrité psychologique, morale, sentimentale ou émotionnelle, et à tout ce qui a trait à l’identité et au sentiment d’identité du harcelé, qui est loin d’être le seul à souffrir, ses proches souffrent aussi, et même les témoins de ces actes, de ces circonstances. Les femmes sont en général plus susceptibles que les hommes « de vivre des conséquences émotionnelles négatives engendrées par des comportements sexualisés non désirés » : Centre des statistiques sur le genre, la diversité et l’inclusion de Statistique Canada, du 2 déc. 2024[11].     
-Socialement, le harcèlement se présente sous forme de brutalité, d’agissements répétés sur la personne pour la soumettre, provenant d’un individu, d’une communauté, d’une institution, d’un système ou d’une collectivité et qui peuvent avoir un effet grave, un impact considérable direct ou indirect sur la personnalité, la vie ou la carrière de la victime comme les châtiments corporels répétés, le défaut de considération, le manque de reconnaissance, le déni d’existence, voire le fait d’être maintes fois victime de messages électroniques malveillants ou d’images infamantes sur internet, d’appels téléphoniques injurieux ou d’être témoin de violence ou d’en entendre fréquemment parler. Le phénomène de harcèlement est très répandu dans les milieux scolaires, 42,5 % d’élèves sont victimes de harcèlement en 2022, selon le Ministère de la santé et de la protection sociale en partenariat avec le Ministère de l’éducation nationale et du sport et l’appui de l’OMS, Coopération internationale en Santé 2022, avec le soutien de l’OMS Maroc[12].

4)- Quelles sont les causes du harcèlement ? Quels sont les motifs, les raisons de ce mal insidieux susceptible de miner des couples, des familles, des entreprises, des institutions, des sociétés ?   

On peut classer les causes du harcèlement selon que l’on est en présence de la cellule de base comme la famille, d’une structure pédagogique, didactique ou professionnelle, voire d’une organisation globale comme la société, en quatre causes : d’ordre familial, scolaire, professionnel ou sociétal.
-Au niveau familial, la violence, la mainmise et le contrôle persistant de l’enfant ou la négligence excessive à l’égard de celui-ci sont les principales caractéristiques du harcèlement. On évoquera particulièrement la maltraitance physique et/ou psychologique, une éducation relâchée et complaisante qui entraînerait de la négligence envers l’enfant ou sa souffrance et/ou le manque de confiance en soi, ou alors une éducation sévère, rigoureuse qui se traduirait par des brutalités sur l’enfant en raison de soi-disant mœurs ou honneur[13].
-Au niveau scolaire, on relèvera notamment les préférences en classe entre les élèves (les bons et les mauvais), l’isolement de l’enfant au sein de l’établissement, (l’enfant est souvent isolé ou esseulé), le manque de surveillance pendant la récréation, ce qui n’est pas le cas dans le cadre de certains établissements conscients de ce mal et de leur responsabilité. Le racket - c’est aussi une forme de harcèlement - des élèves aisés par d’autres élèves en les détroussant de leurs biens précieux, en les délestant de leur argent de poche et de leurs vêtements griffés (de marque), que ce soit au sein de l’établissement ou à la sortie de celui-ci[14]. Les élèves frêles ou de petite taille, faibles, timides, bègues, handicapés ou ayant une infirmité, peuvent aussi faire l’objet de bousculades fréquentes, de moqueries, de railleries, de harcèlement. À l’exemple du suicide d’un élève, en France, dans les Vosges, victime de harcèlement, selon la conclusion de l’enquête, commis dans l’établissement scolaire et sur les réseaux sociaux, de la part d’autres élèves qui ont été poursuivis pour les mêmes faits ayant entraîné le suicide[15]. Le cas également, en 2019, d’une collégienne suicidée à l’âge de 11 ans, et le procès de son enseignante « accusée d’avoir humilié, stigmatisé et isolé » la victime. Elle a été jugée pour « harcèlement moral sur mineurs ». Le tribunal correctionnel de Pontoise, dans le département du Val-d’Oise, avait requis contre elle dix-huit mois de prison avec sursis[16]. Depuis 2 mars 2022, le harcèlement est reconnu, en France, comme délit, passible de 3 à 10 ans d’emprisonnement et de lourdes amendes : de 45.000à 150.000 euros[17].
-Au niveau professionnel, le harcèlement moral et verbal, qui se traduit par des brimades et des insultes, le rabaissement ou la disqualification, sont fréquents au sein de l’entreprise, de l’administration, à cause justement de l’âge ou des origines du salarié, de ses mœurs, de ses convictions religieuses, de ses opinions politiques ou de ses activités syndicales. Les dirigeants, cadres, contremaîtres, ou chefs de chantier (voire agents ou employés) peuvent exercer du harcèlement au sein de l’entreprise ou de l’administration sur les employés ; harcèlement qui peut conduire à la détérioration de l’atmosphère et des conditions du travail, et qui est susceptible de relever du code pénal : d’après le témoignage d’un employé, et de tous ceux, nombreux, qu’usent, malheureusement «l’injustice et la tyrannie des bureaux» J. Michelet. Depuis le début de sa privatisation en 2016 et la dégradation des conditions de travail « au profit d’une rentabilité aveugle » au sein de France Télécom, plus de 50 suicides ont été observés à causes de harcèlement moral et institutionnel par les supérieurs hiérarchiques de cette entreprise[18].
-Au niveau de la société, on notera l’absence ou le manque d’un contrôle public responsable, ainsi que le manque ou l’absence de sanctions pénales et d’une application rigoureuse de la loi. On relèvera également le carcan imposé socialement, ou le contrôle diffus ou social, que subissent certaines catégories d’individus ou de communautés à cause de leurs origines, de leur rang socioprofessionnel, de leurs croyances[19], de leurs mœurs, de la couleur de leur peau ou de leur infirmité ou handicap. 35% des internautes affirmaient en 2018, ayant été victimes de cyberharcèlement[20]. Au Canada, des enquêtes menées depuis 2018 jusqu’à 2024 par le Centre des statistiques sur le genre, la diversité et l’inclusion en collaboration avec le Centre canadien de la statistique juridique et de la sécurité des collectivités, soulignent une nette tendance selon laquelle les femmes et les minorités fragiles (personnes ayant une incapacité, une orientation sexuelle, racisées, autochtones, et immigrants) sont plus susceptibles d’être la cible de harcèlement comparativement aux autres membres de la société[21].

5)- Quelles sont les conséquences du harcèlement ? Quels sont les effets, incidences, séquelles, répercussions, troubles ou symptômes du harcèlement ?

Le harcèlement en général, quelle que soit sa forme - physique, verbale, morale ou psychologique - et quelle que soit son origine - familiale, scolaire, professionnelle, administrative, ou sociétale - peut avoir des conséquences néfastes non seulement sur la victime mais aussi sur ses proches et sur la société.  
Les troubles, symptômes et séquelles du harcèlement peuvent apparaître au niveau du noyau familial, de l’établissement scolaire, de l’entreprise, de l’administration ou de la société tout entière. « Je trouve l’apaisement de mes  tourments dans ma solitude, assis chez-moi à l’ombre d’un olivier », m’avait un jour confié un collègue de travail, harcelé puis mis au placard, quelques mois avant sa mort.
-On relèvera au sein de la famille, ou encore parfois chez les femmes qui élèvent leurs enfants toutes seules, l’éclatement du noyau familial, en raison des disputes, des altercations, des violences, et les conséquences qui peuvent s’ensuivre comme les troubles de la parole, du comportement alimentaire ou de la personnalité, la perturbation des enfants, le repli sur soi, les fugues fréquentes, ou le vagabondage, ou un profond mal-être pouvant dégénérer jusqu’à l’anorexie, ou au suicide carrément. Les risques et troubles psychologiques et sociaux ainsi que les conduites suicidaires dans les milieux familiaux, scolaires et professionnels sont très répandus, pour plusieurs raisons dont le harcèlement, constate le Conseil économique, social et environnemental dans son rapport annuel de 2022, sur la santé mentale et les causes de suicide au Maroc[22].      
-On notera qu’au sein des établissements scolaires, et particulièrement «en fin d’école primaire et au collège », que les risques de ces actes de brutalités et la violation d’intimité sont plus nombreux et plus graves. On insistera notamment sur l’isolement, la somatisation (maux d’estomac, de dos, de tête, trouble psychique), le sentiment de honte, l’échec ou le décrochage scolaire, voire la déscolarisation, la dépression ou le repli sur soi, l’anxiété, le stress, et d’autres problèmes de santé encore d’ordre physique et/ou psychique (selon le témoignage de parents d’élèves et de collégiens, recueillis aux portes d’un établissement scolaire).  
Au niveau de l’entreprise, la banque ou l’administration, les incidences du harcèlement sont elles aussi plus grandes et plus graves. En effet, outre l’absentéisme, la perte de l’emploi, la baisse de productivité, une atmosphère toxique au sein de l’organisation, la dépendance et l’addiction à l’alcool, voire la toxicomanie, on peut relever quelque chose de plus grave encore. En fait, un employé, salarié, ouvrier ou cadre, voire directeur ou gérant qui, harcelé dans son travail à longueur de journée, finit par se suicider laissant derrière lui toute une famille, et les conséquences familiales, psychologiques et financières sont autrement plus traumatisantes. C’était le cas de la factrice de 44 ans, en Dordogne, et celui du postier Charles G. « lettre d’un facteur désespéré » et de beaucoup d’autres victimes de harcèlement à causes des conditions de travail déplorables au sein de l’entreprise France Télécom. « Révolution Permanente » a recueilli sur le sujet des témoignages des salariées de la RATP et a eu accès, en la matière, à des documents sensibles[23].
Au niveau de la société, les actes du harcèlement sont répandus dans tous les milieux,  touchent toutes les catégories socioprofessionnelles et font intégralement partie, malgré leur dangerosité, de la vie sociale quotidienne. Les agissements répétés des malfaiteurs ont souvent pour but de nuire à la victime, de l’atteindre dans sa santé, physique ou morale, que ce soit au sein de la famille, de l’entreprise, de l’administration, d’une ONG ou dans la rue. Des statistiques de 2018, en droit pénal comparé, évaluent à 86 % les femmes qui ont déclaré avoir subi un harcèlement de rue[24].

6)- Comment se protéger du harcèlement ? Comment sortir du harcèlement ? Quelle est la thérapie contre ce phénomène pernicieux ? Comment l’éradiquer ?

Alors, quelles sont les mesures à prendre pour se protéger du harcèlement et comment en sortir si l’on est victime ? Grâce aux proches, à l’entourage et aux organismes et institutions spécialisés les victimes du harcèlement disposent de différents dispositifs et moyens efficaces pour se prémunir contre ce fléau[25].
-Le rôle de la famille est très important, si elle reste en alerte à l’égard de son enfant : en le  surveillant, en étant attentive à ses comportements, et s’il y a des signes anormaux détectés dans ses habitudes, des signaux de détresse physique ou psychique, elle peut agir à temps et efficacement auprès de l’établissement, des institutions spécialisées, d’un psychologue, ou pédopsychiatre, voire le cas échéant auprès de la police et de la justice. Les magistrats sont là pour faire comprendre à tout harceleur que ni l’entreprise, ni l’administration, ni l’établissement scolaire ou les réseaux sociaux ne sont « des zones de non droit ». 
-L’établissement scolaire a aussi un rôle fondamental à jouer auprès des élèves, et ce à tous les niveaux : primaire, collège et lycée, à travers le fonctionnement de l’institution, en particulier la prévention et la surveillance pendant les cours, durant la récréation, pendant les entrées et les sorties de l’établissement. Les établissements scolaires conscients de la gravité de ce mal et conscients de leur responsabilité accomplissent en l’occurrence assurément leur tâche au mieux, le cas notamment des actions menées au Maroc par des lycées pilotes ayant leur site sur internet comme le Lycée français d’Agadir-OSUI, le Lycée Descartes à Rabat, le Lycée Lyautey à Casablanca, le Collège Saint-Exupéry à Rabat[26].      
-Les associations de défense des victimes du harcèlement, les services de l’administration publique dédiés à ces causes, les institutions spécialisées en matière de protection des données informatiques à caractère personnel, tous ces organismes ont des rôles très importants à assumer dans ce domaine. Par exemple, la Commission Nationale de Protection des Données Personnelles (CNPDP), a pour objet la protection contre les agissements informatiques de nature à porter atteinte à la vie privée des particuliers[27].
-Les personnes adultes et /ou les familles des mineurs, ou des élèves mineurs, voire les étudiants, ayant été victimes du harcèlement caractérisé ou de nature à porter sérieusement atteinte physique, morale ou verbale à leur personne peuvent faire valoir leurs droits devant les tribunaux compétents[28]. En effet, la Cour de cassation en France estime que la Cour d’appel n’a pas motivé sa décision au regard des articles 222.23 du code pénal et 591 et 593 du code de procédure pénale, lorsqu’elle avait considéré que des propos proférés ou des comportements adoptés de la part d’un enseignant visant collectivement un groupe de personnes – cas de cours ou de travaux dirigés à l’université par exemple, ne constituent pas un harcèlement sexuel. Alors que de tels propos, considère la Cour de cassation, « à connotation sexuelle ou sexiste adressés à plusieurs personnes, ou de tels comportements adoptés devant personnes, sont susceptibles d’être imposés à chacune d’entre elles », et par conséquent constitue un « harcèlement environnemental ou d’ambiance » caractérisé lorsque chacune d’entre elles « y est personnellement exposée dans des proportions qui créent à son égard une situation hostile ou offensive [29]».                    

7)- Ce fléau moderne qui ronge le tissu social, cette plaie qui mine la cohésion sociale !

Le harcèlement est un fléau social, et ce n’est nullement par quelques mesures superficielles qu’on en vient à bout, «c’est du fond des cœurs qu’il faut l’arracher» ; et pour l’éradiquer tous les acteurs socioéconomiques et politiques du pays doivent collaborer, puisqu’ils sont tous non seulement solidairement responsables mais aussi collectivement impliqués d’une manière ou d’une autre : familles, entreprises, administrations, organisations gouvernementales et non gouvernementales. En effet, si la cohésion sociale est la capacité d’une structure sociale à assurer le bien-être de ses membres elle est aussi l’aptitude de leur éviter d’endurer de terribles souffrances.

Références bibliographiques

1)- Art. 222-33-2-2 du code pénal, français, modifié par Loi n° 2024-247 du 21 mars 2024-art. 3.
2)- Association lutte contre le harcèlement ; France 3 nouvelle aquitaine 2021, América Lopez, le 30 nov. 2023, une fille de 15 ans victime de harcèlement, France 3 Régions, du 13 févr. 2024.
3)- Caroline Beyer, Harcèlement scolaire : quand l’ombre de la prison plane sur l’école, publié le 1er déc. 2021.
4)- Cass. Crim., 12 mars 2025, n°24-81.644, au Bull.
5)- Cécile Manchette et Ivan Ferrero, Révolution Permanente, Enquête : Comment la RATP maltraite ses agents victimes de violences sexistes et sexuelles, article du 13 févr. 2025.
6)-Centre des statistiques sur le genre, la diversité et l’inclusion de statistique Canada, en collaboration avec le Centre canadien de la statistique juridique et de la sécurité des collectivités, enquêtes échelonnées sur la période 2018-2024.
7)- Enquête de Statistique Canada menée du 18 octobre au 31 décembre 2018, disponible sur le Net
8)- Harcèlement criminel, Partie III du Code criminel, canadien, art. 264, sur le Web.
9)-La Campagne nationale pour la lutte contre le cyberharcèlement organisée par le Ministère de la transition numérique au Maroc et de la réforme de l’administration, du 16 au 30 nov. 2021, et l’Association défi pour l’égalité et la citoyenneté.
10)- La direction générale de l’administration pénitentiaire et de la réinsertion (DGAPR) indique que «les études internationales ont montré que les taux de suicide et d’atteinte à l’intégrité physique (AIP) dans les lieux de détention sont plus élevés que ceux dans la population générale ».
11)- La Santé mentale et les causes de suicide au Maroc, harcèlement compris, Conseil économique, social et environnemental, CESE, saisine n° 23 :2022.
12)-Laure-Alice Bouvier, Le harcèlement scolaire est enfin reconnu comme un délit par la loi, tant mieux, mais après ? Publié le 8 mars 2022, accessible sur le Web.
13)- Les Archives du Monde du 17 déc. 2024 ; du 11 mars 2025 ; du 21 mars 2025 
14)- Loi marocaine n°09-08 relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel, du 18 févr. 2009, B.O. n°5714 du 5 févr. 2009.
15)-Maxime Gautier, Le cyberharcèlement en France, Faits et chiffres, publié sur le Net, le 13 déc. 2023.
16)- Marine Gautier, Le harcèlement sous toutes ses formes : quels sont les recours pour les victimes ? Académie de Clément, Publié le 25 janv. 2021, 10 pages.
17)- Publication de l’Organisation mondiale de la Santé, OMS Maroc, du 16 février 2023, rapport disponible sur le Web.
18)- Rapport de l’OMS en 2019 : 2617 suicides ont été enregistrés au Maroc, dont 865 suicides de femmes et 1752 d’hommes, ce qui situe la prévalence du suicide en général autour de 7,2 pour 100 000. Le harcèlement sous toutes ses formes n’est pas exclu.
19)-UNESCO : Violences et harcèlement scolaires, appelle à mieux protéger les élèves face aux agressions physiques, verbales et psychologiques dont ils font l’objet, 8 nov. 2024.
20)-Un membre de l’équipe des chercheurs scientifiques dans la station Sud-africaine Sanae IV harcèle violement et sans répits ses collègues qui, de ces faits et actes, vivent un climat de peur et d’angoisse, pendant cette mission de recherche pour dix mois qui est devenue par la force des choses intolérable, v. Yohan Roblin, publication du 17 mars et mis à jour le 19 mars, 2025, accessible sur le Web.       
21)- Vincent Daniel, France Télévisions, Harcèlement moral et suicides chez France Télécom : le long travail d’Orange pour regagner la confiance de ses salariés, publié et mis à jour, sur le Net, le 5 sept. 2018.
22)-Vincent Vantighem, Vague de suicides à France Télécom : les anciens dirigeants seront fixés sur leur sort en septembre, publié le 27 juil. 2022, Le Quotidien du 6 juil. 2022 Actualité juridique. « Je me suicide à cause de France Télécom, écrivait Michel D. en juil. 2009, c’est la seule cause ».       
Jilali Chabih, Docteur et HDR, Paris 2 et Paris 5, et Docteur d’État, UCAM- Maroc, en droit, finance, fiscalité, administration et méthodes de recherche.
 
      

[1]-«Aujourd’hui Seuls 32 États disposent d’un cadre juridique complet dédié à la lutte contre la violence à l’école », UNESCO, Violences et harcèlement scolaires, 8 nov. 2024 ; La Campagne nationale pour la lutte contre le cyberharcèlement organisée par le Ministère de la transition numérique et de la réforme de l’administration, du 16 au 30 nov. 2021, et l’Association défi pour l’égalité et la citoyenneté, accessible sur le Net ; Khaoula Benhaddou, Harcèlement scolaire : d’une simple rigolade au suicide, publié sur le Web le 25 oct. 2024.   
[2]-À l’occasion de la journée internationale contre la violence et le harcèlement en milieu scolaire L’UNESCO « appelle à mieux protéger les élèves face aux agressions physiques, verbales et psychologiques dont ils font l’objet, en particuliers face à la montée des discriminations et des violences liées au genre et à l’identité sexuelle », publié sur le Web le 8 nov. 2024.
[3]-Les personnalités victimes de harcèlement scolaire se confient, le Journal des femmes, du 6 nov. 2023, accessible sur le Net.   
[4]-Association lutte contre le harcèlement ; France 3 nouvelle aquitaine 2021, América Lopez, le 30 nov. 2023, une fille de 15 ans victime de harcèlement, France 3 Régions, du 13 févr. 2024, accessible sur le Web.
[5]-Paris Match, actualité politique, 10 janv. 2024, et celui du 7 nov. 2023.
[6]-86% des femmes en France déclarent avoir subi des actes de harcèlement de rue, Marine Gautier, Le harcèlement sous toutes ses formes : quels sont les recours pour les victimes ? Académie de Clément, Publié le 25 janv. 2021, 10 pages.   
[7]-Harcèlement criminel, Partie III du Code criminel, canadien, art. 264, sur le Web.
[8]- Erwan Balanant, membre du MoDem, député de la huitième circonscription du Finistère, cité par C. Beyer, in Harcèlement scolaire : quand l’ombre de la prison plane sur l’école, publié le 1er déc. 2021, accessible sur le Web.  
[9]-Reclus pour dix mois, à plus de 4.000 km de chez eux, dans la station antarctique Sanae IV, dix scientifiques sud-africains vivent «un climat de peur et d’intimidation» par l’un de leur collègue l’accusant de menaces de mort et d’agression physique et même sexuelle. Yohan Roblin, publié le 17 mars et mis à jour le 19 du même mois 2025, disponible sur le Net.  
[10]-Marine Gautier, Le harcèlement sous toutes ses formes : quels sont les recours pour les victimes ? Justifit. Publié le 12/06/2024, 20 pages, disponible sur le site Web. En France, un élève sur dix, soit près d’un million, est victime de harcèlement, « Ça pouvait être grave, je n’en pouvais plus. C’était des insultes tous les jours, sur les réseaux sociaux ou au collège. Vivre ça, ce n’est pas cool, c’est la boule au ventre à venir au collège en se disant ce qui va se passer ? », « Ça me faisait un poids sur le corps, sur le cœur » : le harcèlement scolaire avec des mots d’enfants, France info, publié sur le Web le 9 nov. 2023.      
[11]-Enquête de Statistique Canada menée du 18 octobre au 31 décembre 2018, disponible sur le Net.
[12]-Publication de l’Organisation mondiale de la Santé, Maroc, du 16 février 2023, rapports disponible sur le Web.    
[13]-Le fanatisme aveugle, quel qu’il soit : religieux, politique ou intellectuel, exercé au sein de toute organisation, quelle qu’elle soit : famille, entreprise, établissement scolaire, administration, l’entraine vers la catastrophe inéluctablement.  
[14]-L’État français a été condamné par le tribunal administratif de Versailles à indemniser les parents d’un élève victime de suicide sous le motif d’un « défaut d’organisation du service public d’enseignement ». Le tribunal considère que l’établissement n’avait pas pris les mesures et sanctions disciplinaires appropriées à l’encontre des auteurs de ces actes répréhensibles. Le Monde du 21 mars 2025.  
[15]- La famille de l’élève avait dénoncé les faits de harcèlement, et une enquête administrative avait été annoncée par le ministre de l’Éducation nationale d’alors Pap Ndiaye, Le Monde du 17 déc. 2024.
[16]- Le Monde du 11 mars 2025.   
[17]-CF. également l’art. 222-33-2-2 du code pénal, français, modifié par Loi n° 2024-247 du 21 mars 2024-art. 3 ; Caroline Beyer, Harcèlement scolaire : quand l’ombre de la prison plane sur l’école, art., précité ; Laure-Alice Bouvier, Le harcèlement scolaire est enfin reconnu comme un délit par la loi, tant mieux, mais après ? Publié le 8 mars 2022.
[18]-Réseau international, Révolution Permanente, du 26 oct. 2018 accessible sur le Net ; Vincent Daniel, France Télévisions, Harcèlement moral et suicides chez France Télécom : le long travail d’Orange pour regagner la confiance de ses salariés, publié et mis à jour le 5 sept. 2018 ; Vincent Vantighem, Vague de suicides à France Télécom : les anciens dirigeants seront fixés sur leur sort en septembre, publié le 27 juil. 2022, Le Quotidien du 6 juil. 2022 Actualité juridique, disponibles sur le site Web.      
[19]-Des Ouïgours ont porté plainte en Franc, en mars 2025, pour « infractions de génocide et de harcèlement moral et de menaces répétées à l’encontre des membres de la diaspora ouïgoure en France de la part de la Chine », Archives du Monde du 11 mars 2025.   
[20]-Maxime Gautier, Le cyberharcèlement en France, Faits et chiffres, publié sur le Net, le 13 déc. 2023.
[21]-Le Centre des statistiques sur le genre, la diversité et l’inclusion de statistique Canada, en collaboration avec le Centre canadien de la statistique juridique et de la sécurité des collectivités, 2018-2024, accessible sur le Web.        
[22]-Selon le rapport de l’OMS en 2019 - 83 pages - 2617 suicides ont été enregistrés au Maroc, dont 865 suicides de femmes et 1752 suicides d’hommes, ce qui situe la prévalence du suicide autour de 7,2 pour 100 000. La Santé mentale et les causes de suicide au Maroc, dont le harcèlement aussi, CESE, saisine n° 23, 2022, p. 44 et s. La direction générale de l’administration pénitentiaire et de la réinsertion (DGAPR) indique que «les études internationales ont montré que les taux de suicide et d’atteinte à l’intégrité physique (AIP) dans les lieux de détention sont plus élevés que ceux dans la population générale, cf. même rapport du CESE, p. 45. Là aussi le phénomène de harcèlement n’est pas exclu.    
[23]-Cécile Manchette et Ivan Ferrero, Révolution Permanente, Enquête : Comment la RATP maltraite ses agents victimes de violences sexistes et sexuelles, article du 13 févr. 2025, disponible sur le Web. 
[24]- Marine Gautier, Le harcèlement sous toutes ses formes : quels sont les recours pour les victimes ? Article du 25 janv. 2021, accessible sur le Net. Le harcèlement, physique ou moral, et quel que soit le moyen utilisé est désormais un délit puni par le Code pénal d’emprisonnement et d’amendes dans de nombreux pays. La peine peut-être aggravée en fonction de la gravité de l’acte et de ses conséquences sur la victime.      
[25]-Site de Lycée Descartes, Rabat- Maroc, pour la lutte contre le harcèlement, selon cet établissement environ 10% des élèves sont touchés par ce fléau, particulièrement dans les pays où la scolarité est obligatoire. Le lycée a mis en place, depuis 2014, un dispositif de prévention contre le harcèlement scolaire consistant à informer les élèves et les parents, à repérer les situations critiques, et à traiter le problème dès qu’il se présente.  
[26]-Le phénomène du harcèlement représente en effet la domination des « forts » sur les « faibles ». Les actions contre le harcèlement menées par ces lycées associent élèves, familles, professeurs, direction et administration sur des activités au sein de ces établissements autour de visualisation des vidéos, rencontres des psychologues et des débats en classe sur le sujet. 
[27]-Loi marocaine n°09-08 relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel, du 18 févr. 2009, B.O. n°5714 du 5 févr. 2009.  
[28]-Article 40 du code du travail : Sont considérées comme fautes graves commises par l'employeur, le chef de l'entreprise ou de l'établissement à l'encontre du salarié : l'insulte grave, la pratique de toute forme de violence ou d'agression dirigée contre le salarié, le harcèlement sexuel, l'incitation à la débauche. Est assimilé à un licenciement abusif, le fait pour le salarié de quitter son travail en raison de l'une des fautes énumérées au présent article, lorsqu'il est établi que l'employeur a commis l'une de ces fautes.
Article 503-1 du code pénal : Est coupable d'harcèlement sexuel et puni de l'emprisonnement d'un an à deux ans et d'une amende de cinq mille à cinquante mille dirhams, quiconque, en abusant de l'autorité qui lui confère ses fonctions, harcèle autrui en usant d'ordres, de menaces, de contraintes ou de tout autre moyen, dans le but d'obtenir des faveurs de nature sexuelle.
[29]-Cass. Crim., 12 mars 2025, n°24-81.644, au Bull. Landot & associé, Avocats à la Cour. Éric Landot 13/03/2025, disponible sur le Web.



الاربعاء 16 أبريل 2025
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