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Le Maroc face à la crise financière et économique mondiale

     

المغرب في مواجهة الأزمة المالية و الإقتصادية العالمية



Le Maroc face à la crise financière et économique mondiale


RESUME

La crise mondiale actuelle a surpris les gouvernements de la planète par son ampleur et sa brutalité. Malgré les plans de relance économique mis en place et l’injection massive de capitaux pour renflouer les systèmes financiers, la perte de confiance des acteurs économiques persiste et un climat d’incertitude domine la conjoncture mondiale. L’horizon de sortie de crise reste ainsi incertain.

Cette crise se distingue aussi par son lot de grandes interrogations sur la configuration qu’aura le monde post-crise. Elle a donné lieu à une action concertée au niveau international (G20 essentiellement) pour tenter de réviser la régulation des systèmes financiers.

Pour autant, cette concertation n’a pas empêché les Etats de se lancer dans de nouvelles stratégies de négociation et de repositionnement dans la mondialisation, porteuses de grandes implications aussi bien au plan de la carte économique et industrielle mondiale qu’au plan des relations internationales.

Les enjeux liés à cette crise appellent à mener une réflexion stratégique sur la trajectoire socio-économique du Maroc, réflexion qui procède d’une double préoccupation.

Il s’agit, d’une part, de permettre au Royaume de poursuivre sereinement son train de réformes tout en faisant résolument face à la crise et, d’autre part, de saisir les opportunités et d’intégrer les inflexions majeures qui se dessinent pour le monde de l’après-crise et qui ne seront pas sans conséquences stratégiques sur notre pays.

Pour y apporter sa contribution, l’Institut Royal des Etudes Stratégiques (IRES) a initié depuis novembre 2008 un processus de réflexion et de veille sur la crise mondiale et ses impacts sur le Maroc, dont les premiers éléments d’analyse sont restitués ci-après. Le Maroc, après avoir été épargné dans un premier temps par la crise financière, grâce à la solidité de son système bancaire et à sa faible exposition aux marchés financiers internationaux, subit depuis le deuxième semestre 2008 les répercussions de la crise économique mondiale par le biais des secteurs exportateurs, de l’activité touristique, des transferts des Marocains Résidant à l’Etranger (MRE) et des flux des investissements extérieurs. Au-delà des répercussions directes sur
certains secteurs, la crise actuelle a mis en exergue des déficiences structurelles antérieures à la crise qui affectent peu ou prou l’économie marocaine. Parmi elles figurent la soutenabilité budgétaire limitée, la faible compétitivité de l’économie, l’aggravation du déficit commercial,l’étroitesse du marché intérieur ou encore, les dysfonctionnements intermittents, mais majeurs, en termes de gestion des dossiers stratégiques et de gouvernance.

Le Gouvernement a mis en place un comité de veille stratégique public-privé, chargé d’anticiper les effets potentiels de la crise et d’élaborer des plans de contingence, prêts à être déployés en fonction des développements constatés. Les premières mesures anti-crise -sociales, financières et commerciales- ont ciblé les secteurs affectés (textile, cuir, sous-traitance automobile, tourisme et, récemment, électronique).

En 2009, les effets de la crise seront atténués par les résultats de la campagne agricole et la bonne tenue de la demande intérieure.

Néanmoins, le taux de la croissance non agricole baissera de manière significative
(estimé à 3% au lieu de 5% en moyenne pour la période 2004-2008) et la balance
des paiements courants sera fragilisée. Les perspectives pessimistes chez nos principaux partenaires économiques devraient induire des développements plus importants qui risqueraient de réduire les marges de manoeuvre du pays et de compromettre les acquis économiques et sociaux de ces dernières années.

Dans ce contexte, le Maroc devrait résoudre les problématiques structurelles dont le caractère critique a été exacerbé par la crise actuelle et préparer avec détermination l’après-crise.

Il en découle quatre orientations majeures, pouvant constituer la base d’une feuille de route nationale:

• Premièrement, consolider le lien social à travers une refonte des politiques sociales

Le premier impératif au plan social sera de maintenir la confiance et d’entretenir un climat social serein, en approfondissant les programmes de développement humain (INDH, éducation, santé), en renforçant le dialogue social et en activant les espaces de médiation sociale, en particulier le Conseil Economique et Social (CES) qu’il serait opportun de mettre en place rapidement.

Parallèlement, une profonde refonte des politiques sociales devrait être opérée.

Il s’agira, en particulier, de réorganiser profondément le paysage national des acteurs du développement social pour plus de responsabilisation, de convergence et d’efficacité, en capitalisant sur les acquis de ’INDH, de mettre en exécution la réforme progressive du système de compensation pour plus d’équité sociale et d’efficacité économique et d’étudier l’opportunité de mise en place d’un dispositif de protection de l’emploi et des salariés, en évaluant son coût et son impact économique et social.

• Deuxièmement, améliorer la gouvernance des politiques publiques dans le sens de plus de cohérence, d’efficacité et de pro-activité

A cet effet, au plan institutionnel, il est proposé de mettre en place un cadre approprié de coordination des politiques publiques (comité interministériel, instance dédiée, institutionnalisation du «comité de veille stratégique»). Ce cadre aurait notamment pour première mission de piloter d’une part, une revue croisée des objectifs et de la cohérence des grandes stratégies sectorielles (Maroc Vert, Eau, Plan Azur, Emergence, Education-Formation…) afin d’en harmoniser l’horizon temporel et d’en accélérer le rythme de réalisation et, d’autre part, un audit des accords commerciaux bilatéraux et multilatéraux du Maroc, à la lumière de la nouvelle donne mondiale et des intérêts nationaux.

L’effort de coordination ne saurait toutefois s’arrêter à la sphère stratégique. Il sera impératif de mettre en place les processus nécessaires à sa déclinaison au plan opérationnel, dans les démembrements de l’Etat les plus déconcentrés, afin d’assurer l’intégration et la bonne exécution des
politiques publiques et sectorielles au niveau
local.

L’amélioration de la gouvernance des politiques publiques nécessitera également de se donner des moyens efficient s de suivi et de mesure de l’efficacité de l’action publique, à travers une reconfiguration des instruments nationaux de planification stratégique et une mise à niveau du système national d’information

En outre, l’exécution des politiques publiques et la performance des administrations qui en
ont la charge devraient être systématiquement soumises à des évaluations régulières.

• Troisièmement, au plan économique, relever le défi de la compétitivité et porter une vigilance accrue sur la préservation de certains équilibres macroéconomiques

Le chantier le plus urgent au plan économique consiste à remédier définitivement à l’érosion de la compétitivité de l’économie nationale, en oeuvrant notamment à rehausser la productivité des entreprises et la qualité du capital humain. Parallèlement à cela, le Maroc gagnerait à prendre rapidement le train de l’innovation et des mutations technologiques, à travers la dynamisation de l’enseignement supérieur et de la recherche et l’élaboration d’une feuille de route nationale pour la croissance verte.

Par ailleurs, la crise actuelle met clairement en évidence la nécessité de développer un marché intérieur dynamique, entraîné par une classe moyenne élargie et un tissu d’entreprises nationales compétitives.

Pour pouvoir bénéficier de la dynamique de l’après-crise, une vigilance accrue devra par ailleurs être portée sur la préservation de certains équilibres macroéconomiques.

D’une part, le Maroc devrait déployer tous les moyens possibles afin que ses réserves en devises soient maintenues au-dessus du plancher stratégique de 6-7 mois d’importations. En particulier, les grands
projets d’infrastructures ou d’équipement gagneraient à être réexaminés à la lumière de leurs impacts sur la balance des paiements.

De même, il est recommandé de renforcer la politique de proximité et d’incitation en direction des Marocains Résidant à l’Etranger.

D’autre part, la gestion des finances publiques doit demeurer prudente, à travers une surveillance étroite des recettes fiscales et une attention accrue sur les rubriques les plus rigides de la dépense publique, notamment la masse salariale de l’Etat, les autres dépenses de fonctionnement et les charges de compensation.

Il va de soi que la soutenabilité des finances de l’Etat constitue à la fois un sujet de vigilance, en ce temps de crise et un domaine de réforme continue.

• Quatrièmement, approfondir l’ancrage régional du Royaume:

La crise actuelle rappelle le caractère décisif de l’ancrage à des ensembles régionaux solides et intégrés et invite ainsi le Maroc à concrétiser rapidement le projet du statut avancé avec l’Union Européenne, à intensifier ses rapports de partenariat avec le voisinage africain et à saisir systématiquement les opportunités de renforcement des relations avec tout pays du Maghreb qui le souhaite.

En promouvant ainsi des approches novatrices de coopération régionale, le Maroc contribuera à l’émergence d’un espace pertinent d’amortissement en périodes de crise et de construction de
réponses communes.

Il sera par ailleurs nécessaire de renforcer la surveillance sur le plan sécuritaire et migratoire à l’échelle régionale, alors que l’aggravation de la vulnérabilité de certains pays d’Afrique subsaharienne
pourrait occasionner une intensification des trafics (armes, drogues, contrebande de marchandises...) et une recrudescence des
flux de migration clandestine.

***
Au delà de la gestion de la crise actuelle, le Maroc devra veiller avec vigilance à se prémunir contre les menaces aujourd’hui permanentes et de long terme sur le plan climatique et sanitaire, en intégrant la
donne environnementale dans ses politiques publiques et en se munissant de dispositifs adaptés de prévention et de réaction aux catastrophes naturelles et aux risques de pandémies.

Il devra également se préparer à affronter la raréfaction de l’eau et de l’énergie qui ne peut que s’aggraver en l’absence de profondes modifications des modes de production et de consommation au plan mondial et provoquer des crises énergétiques et alimentaires systémiques à répétition.

Il sera enfin de la plus haute importance pour notre pays d’adopter avec constance une démarche active de communication, à même d’entretenir la confiance de ses citoyens et de ses partenaires étrangers.





l’Institut Royal des Etudes Stratégiques (IRES)




الاثنين 14 نونبر 2011
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