A l’instar des autres pays du globe touchés par la propagation épidémique du Covid-19, le Maroc a entrepris depuis le 23 Mars 2020, plusieurs mesures législatives, réglementaires et sanitaires pour gérer cette période de crise internationale. Ainsi, un décret-Loi n°2.20.292 portant sur les dispositions relatives à l’état d’urgence sanitaire et aux procédures de sa déclaration, a été publié, mardi 24 mars, au Bulletin officiel. Il s’inscrit dans le cadre des mesures préventives accomplies pour lutter contre cette pandémie. Ledit décret prévoit dans son article 5 que le gouvernement peut prendre, en cas de nécessité absolue, des mesures exceptionnelles urgentes à caractère économique, financier social ou environnemental, à même de contribuer directement à faire face aux impacts négatifs de l’état d’urgence.
En effet, l'ensemble des mesures préventives prises pour permettre la réussite du confinement, avaient des conséquences sur la vie économique et le fonctionnement du marché a été complètement perturbé (fermeture des frontières, fixation des prix de certains produits, fermeture des magazines et de certains secteurs économiques …). Pour pallier à ces effets secondaires de la crise sanitaire un comité de veille économique a été mis en place afin de contribuer dans l'accompagnement socio-économique des entreprises affectées par la crise. A cet effet, les travaux de celui-ci ont donné naissance à plusieurs mesures spécifiques comme : le report d’échéances des crédits amortissables, les indemnités devant être accordées aux salariés qui sont en arrêt d’activité …
Cependant, il n'en demeure pas moins que de nombreuses entreprises soient en difficultés et certaines d'entre elles peuvent même se trouver en état de cessation de paiement. De ce fait, et à notre avis, la crise sanitaire serait une grande épreuve pour évaluer l’efficacité de l'arsenal juridique adopté par le Maroc pour aider les entreprises en difficultés, en l'occurrence via la loi 73.17, et de le renforcer aussi surtout à la lumière du droit comparé.
À cet effet nous posons la problématique suivante : Est-ce que le législateur marocain a pu adapter le droit des entreprises en difficultés pour protéger les composantes du tissu économique à l'ère du Covid-19 ?
Pour répondre convenablement à cette problématique, il est indispensable de diagnostiquer l’état des règles communes régissant l’ouverture des procédures des difficultés des entreprises durant et après la crise (I), avant d’examiner l’état des procédures en cours d’exécution (II)
En d'autres termes, le tribunal saisi de l'ouverture d’une procédure collective doit apprécier l'état de cessation de paiement à la date du 12 mars, c'est à dire avant l'entrée en vigueur de l’état d'urgence sanitaire en France.
De ce fait une entreprise qui est économiquement en cessation de paiement pendant cette période d’urgence dite période protectrice, ne le sera pas ainsi d’un point de vue juridique. Par conséquent elle pourra bénéficier de l’ouverture d’une procédure de conciliation ou de sauvegarde.
Cette disposition juridique permet ainsi aux entreprises en difficultés de bénéficier d'un accompagnement judiciaire sans risquer de déposer le bilan et de disparaître du marché. Ainsi c’est l’intérêt du débiteur victime d’un changement brutal des règles du jeu économique et de circonstances dépassant ses possibilités prévisionnelles qui sera privilégié.
Par contre au Maroc, aucune disposition pareille n’a été annoncée. De ce fait, dès la levée de l’état d’urgence et la reprise des audiences judiciaires, les tribunaux pourront déclarer les entreprises en cessation de paiement même si cette situation est intervenue à cause des conditions imposées par l’état d’urgence. Par conséquent, ces entreprises pourront être placées soit en redressement soit en liquidation judiciaire. Mais, elles ne bénéficieront pas d’une procédure de sauvegarde ou de conciliation.
Concernant la conciliation, elle est ouverte par le président du tribunal de commerce, soit de sa propre initiative s’il constate qu’une entreprise fait face à certaines difficultés, soit à la demande du débiteur. Cette procédure a un caractère urgent, dans la mesure où l’article 549 du Code de commerce impose au président du tribunal de convoquer sans délai le chef d’entreprise pour l’interroger et aussi il peut désigner un expert ou demander la communication de tous les documents nécessaires qui sont de nature à lui donner une idée claire sur la situation financière et économique de l’entreprise. A la lumière de cela, on peut dire que la demande d’ouverture d’une procédure de conciliation est exclue du champ de la levée des audiences judiciaire, car elle a un caractère urgent qui justifie sa réalisation auprès du président du tribunal de commerce compétent.
A contrario, l’ouverture d’une procédure de sauvegarde ou de redressement exige un jugement rendu par les juges de fonds. Une possibilité qui est écartée dans les circonstances actuelles de l’état d’urgence sanitaire. Alors que l’article 2, I, 2° de l’Ordonnance française a simplifié les formalités pour demander l’ouverture d’une procédure de sauvegarde ou de redressement en autorisant le débiteur à saisir le greffe par tout moyen et l’audience peut se tenir sans sa présence car il est autorisé à formuler par écrit ses prétentions et moyens.
De ce fait, cette suspension permettra la protection des intérêts des parties en cause. Ainsi, des créanciers peuvent être empêchés de déclarer leurs droites suites à la fermeture des frontières entre les régions et les mesures de confinement. Ils pourront donc, à la fin de l’état d’urgence sanitaire déclarer leurs créances sans avoir besoin d’une levée de forclusion.
La suspension des délais permettra également de reporter la réalisation de l’actif dans le cadre d’une procédure de liquidation judiciaire. Dans la mesure où cette opération peut s’avérer impossible en période de confinement.
Prolongation en France des durées des plans :
En effet, la situation engendrée par la crise sanitaire peut empêcher la bonne exécution du plan de sauvegarde ou de redressement déjà arrêté avant l’entrée en vigueur de l’état d’urgence. Raison pour laquelle il fallait prolonger la durée d’exécution de ces plans après la fin de l’état d’urgence et de mettre en œuvre les mécanismes adaptés pour permettre aux organes des procédures collectives en cours de réaliser leur mission dans des bonnes conditions.
Ainsi, l’ordonnance française du 27 mars 2020 prévoit, la prolongation, de pleine droit, de la durée d’une procédure de conciliation d’une durée équivalente à celle de l’état d’urgence sanitaire plus 3 mois. Une décision logique car les négociations que peut émettre le conciliateur en période de confinement seront sans effet et moins efficaces.
Elle prévoit également, à l’expiration d’un mois après l’état d’urgence, une prolongation des plans de sauvegarde et de redressement, de pleine droit (sans audience ni jugement), pour une durée équivalente à celle de l’état d’urgence sanitaire plus un mois.
Le législateur marocain devait ainsi procéder à des mesures expresses comme celle-ci pour ne pas laisser la marge aux appréciations et interprétations diverses. Surtout que le droit des entreprises en difficultés est un droit spécial qui doit être adapté, dans ces conditions, par des mesures spéciales et non pas le soumettre aux règles communes de l’état d’urgence sanitaire.
Conclusion :
Le droit des entreprises en difficultés est un outil juridique efficace, pour accompagner les entreprises dans leur vie économique et leur permettre de faire face aux différentes éventualités du marché qui pourront affecter leur fonctionnement. L’entreprise est un acteur fondamental sur le marché, sa protection et son perfectionnement permettra de protéger l’emploi et aussi de veiller à la stabilité du marché économique. Ainsi, une protection sécurisé et suffisante ne saura assurée sans un arsenal juridique renforcé et adapté.
Malheureusement, le législateur marocain n’a pas profité de la grande réforme effectuée en la matière, en 2018, et surtout en l’adaptant à cette crise qui présente des grands enjeux pour notre économie nationale. Par contre, le législateur français, a essayé d’adapter les règles de ce droit pour qu’elles puissent représenter l’une des mécanismes de lutte contre les effets secondaires de cette pandémie. Et c’est une vision pragmatique que notre législateur devra suivre, pour mobiliser tous les acquis juridique et économiques contre les conséquences terribles de la covid-19.
En effet, l'ensemble des mesures préventives prises pour permettre la réussite du confinement, avaient des conséquences sur la vie économique et le fonctionnement du marché a été complètement perturbé (fermeture des frontières, fixation des prix de certains produits, fermeture des magazines et de certains secteurs économiques …). Pour pallier à ces effets secondaires de la crise sanitaire un comité de veille économique a été mis en place afin de contribuer dans l'accompagnement socio-économique des entreprises affectées par la crise. A cet effet, les travaux de celui-ci ont donné naissance à plusieurs mesures spécifiques comme : le report d’échéances des crédits amortissables, les indemnités devant être accordées aux salariés qui sont en arrêt d’activité …
Cependant, il n'en demeure pas moins que de nombreuses entreprises soient en difficultés et certaines d'entre elles peuvent même se trouver en état de cessation de paiement. De ce fait, et à notre avis, la crise sanitaire serait une grande épreuve pour évaluer l’efficacité de l'arsenal juridique adopté par le Maroc pour aider les entreprises en difficultés, en l'occurrence via la loi 73.17, et de le renforcer aussi surtout à la lumière du droit comparé.
À cet effet nous posons la problématique suivante : Est-ce que le législateur marocain a pu adapter le droit des entreprises en difficultés pour protéger les composantes du tissu économique à l'ère du Covid-19 ?
Pour répondre convenablement à cette problématique, il est indispensable de diagnostiquer l’état des règles communes régissant l’ouverture des procédures des difficultés des entreprises durant et après la crise (I), avant d’examiner l’état des procédures en cours d’exécution (II)
- Sur le plan des règles communes régissant l’ouverture des procédures des difficultés des entreprises :
- L’appréciation de l’état de cessation de paiement
En d'autres termes, le tribunal saisi de l'ouverture d’une procédure collective doit apprécier l'état de cessation de paiement à la date du 12 mars, c'est à dire avant l'entrée en vigueur de l’état d'urgence sanitaire en France.
De ce fait une entreprise qui est économiquement en cessation de paiement pendant cette période d’urgence dite période protectrice, ne le sera pas ainsi d’un point de vue juridique. Par conséquent elle pourra bénéficier de l’ouverture d’une procédure de conciliation ou de sauvegarde.
Cette disposition juridique permet ainsi aux entreprises en difficultés de bénéficier d'un accompagnement judiciaire sans risquer de déposer le bilan et de disparaître du marché. Ainsi c’est l’intérêt du débiteur victime d’un changement brutal des règles du jeu économique et de circonstances dépassant ses possibilités prévisionnelles qui sera privilégié.
Par contre au Maroc, aucune disposition pareille n’a été annoncée. De ce fait, dès la levée de l’état d’urgence et la reprise des audiences judiciaires, les tribunaux pourront déclarer les entreprises en cessation de paiement même si cette situation est intervenue à cause des conditions imposées par l’état d’urgence. Par conséquent, ces entreprises pourront être placées soit en redressement soit en liquidation judiciaire. Mais, elles ne bénéficieront pas d’une procédure de sauvegarde ou de conciliation.
- La demande de l’ouverture d’une procédure pendant l’état d’urgence :
Concernant la conciliation, elle est ouverte par le président du tribunal de commerce, soit de sa propre initiative s’il constate qu’une entreprise fait face à certaines difficultés, soit à la demande du débiteur. Cette procédure a un caractère urgent, dans la mesure où l’article 549 du Code de commerce impose au président du tribunal de convoquer sans délai le chef d’entreprise pour l’interroger et aussi il peut désigner un expert ou demander la communication de tous les documents nécessaires qui sont de nature à lui donner une idée claire sur la situation financière et économique de l’entreprise. A la lumière de cela, on peut dire que la demande d’ouverture d’une procédure de conciliation est exclue du champ de la levée des audiences judiciaire, car elle a un caractère urgent qui justifie sa réalisation auprès du président du tribunal de commerce compétent.
A contrario, l’ouverture d’une procédure de sauvegarde ou de redressement exige un jugement rendu par les juges de fonds. Une possibilité qui est écartée dans les circonstances actuelles de l’état d’urgence sanitaire. Alors que l’article 2, I, 2° de l’Ordonnance française a simplifié les formalités pour demander l’ouverture d’une procédure de sauvegarde ou de redressement en autorisant le débiteur à saisir le greffe par tout moyen et l’audience peut se tenir sans sa présence car il est autorisé à formuler par écrit ses prétentions et moyens.
- Le sort des procédures en cours :
- Suspension des délais légaux
De ce fait, cette suspension permettra la protection des intérêts des parties en cause. Ainsi, des créanciers peuvent être empêchés de déclarer leurs droites suites à la fermeture des frontières entre les régions et les mesures de confinement. Ils pourront donc, à la fin de l’état d’urgence sanitaire déclarer leurs créances sans avoir besoin d’une levée de forclusion.
La suspension des délais permettra également de reporter la réalisation de l’actif dans le cadre d’une procédure de liquidation judiciaire. Dans la mesure où cette opération peut s’avérer impossible en période de confinement.
Prolongation en France des durées des plans :
En effet, la situation engendrée par la crise sanitaire peut empêcher la bonne exécution du plan de sauvegarde ou de redressement déjà arrêté avant l’entrée en vigueur de l’état d’urgence. Raison pour laquelle il fallait prolonger la durée d’exécution de ces plans après la fin de l’état d’urgence et de mettre en œuvre les mécanismes adaptés pour permettre aux organes des procédures collectives en cours de réaliser leur mission dans des bonnes conditions.
Ainsi, l’ordonnance française du 27 mars 2020 prévoit, la prolongation, de pleine droit, de la durée d’une procédure de conciliation d’une durée équivalente à celle de l’état d’urgence sanitaire plus 3 mois. Une décision logique car les négociations que peut émettre le conciliateur en période de confinement seront sans effet et moins efficaces.
Elle prévoit également, à l’expiration d’un mois après l’état d’urgence, une prolongation des plans de sauvegarde et de redressement, de pleine droit (sans audience ni jugement), pour une durée équivalente à celle de l’état d’urgence sanitaire plus un mois.
Le législateur marocain devait ainsi procéder à des mesures expresses comme celle-ci pour ne pas laisser la marge aux appréciations et interprétations diverses. Surtout que le droit des entreprises en difficultés est un droit spécial qui doit être adapté, dans ces conditions, par des mesures spéciales et non pas le soumettre aux règles communes de l’état d’urgence sanitaire.
Conclusion :
Le droit des entreprises en difficultés est un outil juridique efficace, pour accompagner les entreprises dans leur vie économique et leur permettre de faire face aux différentes éventualités du marché qui pourront affecter leur fonctionnement. L’entreprise est un acteur fondamental sur le marché, sa protection et son perfectionnement permettra de protéger l’emploi et aussi de veiller à la stabilité du marché économique. Ainsi, une protection sécurisé et suffisante ne saura assurée sans un arsenal juridique renforcé et adapté.
Malheureusement, le législateur marocain n’a pas profité de la grande réforme effectuée en la matière, en 2018, et surtout en l’adaptant à cette crise qui présente des grands enjeux pour notre économie nationale. Par contre, le législateur français, a essayé d’adapter les règles de ce droit pour qu’elles puissent représenter l’une des mécanismes de lutte contre les effets secondaires de cette pandémie. Et c’est une vision pragmatique que notre législateur devra suivre, pour mobiliser tous les acquis juridique et économiques contre les conséquences terribles de la covid-19.